F***ing perfect

Nous avons trés tôt pour la plupart, appris à faire de notre mieux, à nous dépasser, à nous améliorer, des "peut mieux faire" des bulletins aux encouragements de nos "N +1" nous sommes sans cesse obligés, que nous le voulions ou non, de nous remettre en question.

Et dés lors une obsession, chez certains d'entre nous, toucher du doigt la perfection, s'en approcher si prés que rien dans nos comportements ne serait critiqué.

D'abord le comportement en société, quand on est petit, et qu'on expérimente la politesse, être poli, être sage, dire merci, dire bonjour, sourire, être propre, tenir sur sa chaise, ne pas se salir, et surtout, ne pas se servir sans avoir l'autorisation de le faire.

Acquiescer aux réprimandes, même les plus injustes, ne pas se rebeller, ne pas hausser le ton, ne pas répondre, ne pas être insolent, réprimer ses sentiments, ne pas parler trop fort, ne pas rire trop fort, ne pas pleurer en public, bref, accepter d'être formaté.

Ne pas tomber,ne pas se faire mal, oublier quand rien ne va, oublier les soucis, fermer la porte des souvenirs à double tour et les cacher dans une boite sous le lit, ne plus jamais en reparler.

Bien travailler à l'école, faire de son mieux ne suffit pas, être compétitif, se surpasser en permanence, au détriment de l'esprit d'équipe et du partage, avoir les meilleurs résultats, être aimable avec ses professeurs, ramener de bons bulletins, ne pas faire honte.

Et surtout, manger peu, ne pas se resservir, mais finir son assiette, manger proprement, et en silence, ne pas parler à table, ne pas poser ses coudes, rester discret.

Ne pas être gros, gras, bien portant. Ah oui, ça c'est important. Pour être accepté à l'école, pour être accepté par ses parents, pour être aimé peut être. 

Rester mince, sans faire d'efforts particuliers, ne jamais se plaindre, ne jamais montrer qu'on a mal.

Faire des études, les réussir, en silence, et être meilleur, passer des concours, se surpasser, pour....

Avoir un métier, un métier dont les parents seront fiers, mais porter des oeillères, ne pas se laisser distraire par la vie dehors qui nous appelle et nous encourage à profiter de nos 20 ans.

Etre sérieux, posé, calme, ne pas faire de vague, faire la fierté des siens, et tant pis si c'est dur, tant pis si ça fait mal, tant pis si on sent notre personnalité se débattre dans notre corps.

Etre bon, généreux, souriant, avenant, aimable et partager, donner aux associations caritatives, voter, aider la vieille dame à traverser, être bon au travail, être fort, tout supporter, tout savoir faire, ne jamais se plaindre de rien, ne pas être malade, ne jamais fléchir.

Aimer, mais sans attendre rien en retour, suivre sa route et son petit bonhomme de chemin, sans s'en écarter, sans se poser de questions.

Rester mince, bien habillé, classe, distingué, ne jamais se laisser aller, ne jamais lâcher prise, mais donner aux autres l'image de quelqu'un de cool et de détendu.

Avoir du temps pour sa famille, être disponible, ne jamais en avoir assez, tout partager, n'avoir aucun secret, n'avoir aucun avis bien évidemment, ne jamais critiquer, sourire, opiner, se résigner, mais avoir toujours l'air satisfait.

Et se réveiller un matin, une perfusion accrochée au bras, incapable de bouger, immobile sur un lit d'hôpital, se rendre compte que le temps est passé vite, qu'on n'a eu le temps de rien, qu'on a tout bien réussi, tout bien fait comme on nous a dit et que ça n'a servi à rien.

Que le corps, ce corps, le nôtre lâche un jour sous la pression, plie sous la dureté de ce qu'on nous a toujours obligé à enfouir au fond de nous, et nous laisse cloué là.

Se dire enfin qu'il est bien temps de vivre, qu'on veut voyager, où bon nous semble, qu'on veut se marier à Las vegas avec celui qu'on aime, faire des enfants, maintenant, tout de suite, aller au bout du monde, sauter à l'elastique, et se rendre compte, enfin, qu'à vouloir être parfait on s'est détruit la santé, détruit petit à petit de l'intérieur, pris des cachets pour dormir, longtemps, pour oublier, la dureté du monde, la pression des autres, la pression de l'enfer.

Et se réveiller de ce cauchemar, y penser toute la journée, comme dans la chanson de Téléphone, décider de se lever, de marcher, de courir, de se regarder dans le miroir, sans crainte, sans peur de mal faire, de trébucher, de ne pas plaire, de ne pas convenir, de ne pas être dans la norme, pourvu que dans ce fichu miroir notre image ne nous fasse pas peur et corresponde à ce que l'on est au fond de nous.

Personne ne dirige notre vie, nous sommes seuls maîtres à bord.

Peu importe les critiques, il existera toujours des gens qui s'ennuient pour s'intéresser plus à votre vie qu'à la leur, des gens incapables de faire leur propre bilan et qui s'enquièrent du vôtre.

Peu importe la perfection que le monde extérieur nous impose, l'important, en fin de comptes, c'est d'être heureux d'être soi.

Je commence seulement à comprendre que j'ai quelques qualités qui font, comme vous, de nous des êtres extraordinaires.

Uniques.

F***ing perfect.











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